L'enseignement populaire contre la barbarie

Canard de Barbarie. Photo d'Alexandre Prevost, aucun lien avec le sujet qui nous préoccupe ici.
Canard de Barbarie. Photo d'Alexandre Prevost

Le site https://www.education-populaire.fr/definition/ propose  un texte qui reflète impeccablement ce que lesailesbleues pensent de l'éducation populaire (que nous préférons appeler enseignement populaire parce que, comme ils le disent très bien eux-mêmes : il ne s'agit pas d'éduquer les gens.

Ci contre, un canard dit "de barbarie", complètement innocent de tout acte cruel jusqu'à preuve du contraire.


"Il n’existe pas de définition instituée de ce qu’est l’éducation populaire, et c’est sans doute très bien comme cela.
L’éducation populaire, c’est avant tout l’ambition de ne pas séparer l’action et l’analyse, de ne pas séparer celles et ceux qui font, celles et ceux qui réfléchissent, et celles et ceux qui décident. C’est en cela que l’éducation populaire est directement liée aux pratiques d’autogestion (de nos activités, de nos luttes, de l’économie).

L’éducation populaire, ce n’est pas éduquer le peuple. Ce n’est pas apporter la conscience de l’extérieur à des personnes qu’on considérerait comme « à conscientiser ». Ce sont des dynamiques collectives qui permettent aux dominé-es de développer ensemble une compréhension critique de la société et des origines des inégalités sociales. Il s’agit de se donner les moyens de comprendre le monde pour pouvoir le transformer.
Pour cela, l’éducation populaire nous invite à travailler à partir de nos situations pour les analyser, les comprendre, agir pour les transformer. L’objectif étant de transformer la société, les démarches d’éducation populaire ne sauraient être neutres.

L’éducation populaire, ce n’est pas vulgariser des savoirs, fussent-ils émancipateurs. L’objet n’est pas la diffusion de savoirs (qui peut en revanche être un moyen, même s’il est loin d’être le seul), mais de favoriser l’émancipation et l’émergence de mouvements sociaux de transformation sociale portés directement par les personnes et les groupes sociaux qui subissent des mécanismes structurels d’oppression (économique, raciste, genrée, etc.). Pour cela, on va peut-être favoriser l’appropriation des savoirs, mais on va surtout s’attacher à produire nos propres savoirs, que l’on pourra alors croiser avec d’autres savoirs, savants ou issus de l’expérience d’autres personnes et groupes sociaux.

Par émancipation, on désigne un processus jamais terminé qui se décline conjointement dans deux directions :

  • Développer notre compréhension du monde : remettre en question et déconstruire ce qui parait être des évidences, des normes (ce qui paraît être normal mais qui ne l’est pas forcément), développer une lecture critique de la culture dominante ;
  • Développer notre capacité à avoir prise sur le monde : dépasser notre auto-censure, développer notre pouvoir d’agir, notre audace, oser, et pour cela, apprendre en faisant, expérimenter, nous autoriser à tenter et donc parfois à échouer.

L’objectif de l’émancipation est de sortir collectivement de la place qui nous a été assignée par les rapports sociaux.

L’éducation populaire consiste en des démarches collectives, qui nous amènent à prendre du recul sur les situations insatisfaisantes voire insupportables que nous rencontrons, à les analyser, à travailler ensemble les contradictions qui sont en jeu, à définir les modes d’action pour transformer ces situations.

L’éducation populaire, ce n’est pas une activité d’un après-midi, mais une démarche à long-terme. Elle nous invite à prendre le contrôle de nos actions, et implique de sortir de notre entre-soi pour aller vers une auto-organisation des personnes et des groupes sociaux qui sont habituellement exclus des cadres de réflexion et de décision. En tant que pratique d’autogestion, les démarches d’éducation populaire ne sont généralement pas mises en place pour elles-mêmes, mais à l’occasion d’autres choses. Car l’action et la lutte ont en elles-mêmes une valeur pédagogique : agir et avoir une réflexivité sur son action, cela doit nous permettre de créer une culture et des pratiques politiques, et c’est cela, l’éducation populaire.

Très souvent, les démarches d’éducation populaire menées par les collectifs ne sont pas qualifiées en tant que telles. Les nommer, les penser en tant que pratiques d’éducation populaire, cela permet de les valoriser, de leur donner une réelle place, du temps, et de les évaluer.

Paulo Freire exprime parfaitement la posture d’éducation populaire dans sa phrase « Personne n’éduque personne, personne ne s’éduque seul, les Hommes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde ».

La posture d’éducation populaire est une posture d’accompagnement. Il ne s’agit pas de transmettre, et encore moins de convaincre, mais d’accompagner la production d’une pensée critique, en partant de là où en sont les gens, et non pas de là où on voudrait qu’ils en arrivent. Les accompagnat-rices d’éducation populaire n’assènent pas des vérités, iels ne disent pas aux gens ce qu’ils devraient penser : ils invitent au questionnement, en se raccrochant au réel et aux vécu des personnes,

On n’émancipe pas autrui : l’éducation populaire n’a rien d’une posture avant-gardiste ou prosélyte, mais une invitation à l’autogestion."

Lesailesbleues est une association d'enseignement populaire, loi 1901 à but non lucratif

CONTACTS : Adrien "lesailesbleues" Féraud : lesailesbleues@gmail.com